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L’INSTINCT MASQUÉ

d’homme à homme ne sont pas coutumières, mais tout est exprimé en termes généraux, par allusions vagues. Quand on a tout lu, on n’est guère plus avancé. Eh ! c’est peut-être cela, justement, que le châtelain de Fervaques reproche au jeune Édouard. Les choses avec lui n’ont pas fait un pas. Ou bien, après s’être livré, il se dérobe. Bref, on subodore un mystère. Il y a un chiffre qui nous manque. Ma foi, il était temps que le soupçon nous en vint. Astolphe commençait à nous endormir.

Entre gens bien élevés, bien pensants, aristocrates et dévots, il y a des choses qu’on n’écrit pas, des choses qu’on laisse au cœur de l’ami d’élection le soin de deviner. On feint de parler morale, jusqu’à paraître prêcher, mais je ne sais quoi d’âpre, d’impatient, comme un appel, douloureux d’être si longtemps incompris, se cache derrière le sermon. On a l’air de décrire un site alpestre, « un clair de lune éblouissant sur la neige », dans le Tyrol, mais, sous l’imitation fade du romantisme à la mode, se dissimule un secret amer. Et pendant que sa plume court, arrondit les périodes, comme il déploierait un voile à longs plis, Astolphe, fiévreux, obsédé d’images toutes différentes de celles qu’il s’évertue maladroitement à trouver,