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L’INSTINCT MASQUÉ

loisible de mettre sous le voile de relations amicales des rencontres dont le caractère est tout différent, mais c’est tout le manège du désir lui-même, c’est toute la psychologie du sentiment amoureux qui peut prendre l’amitié pour masque[1]. Tantôt, il y a connivence entre les partenaires, la feinte étant mutuellement admise et employée comme une règle du jeu ; tantôt, l’un des deux est seul à se servir de cette ruse, pour couvrir une tentative de séduction, et se ménager, en cas de besoin, une retraite.

De même que Montaigne et la Boëtie avaient lié connaissance dans une fête, c’est dans un bal, chez la duchesse de Maillé, qu’en 1818, Astolphe marquis de Custine (le fils de celle-là même qui fut l’amie de Châteaubriand) étant âgé alors de vingt-huit ans, rencontre Édouard le Lièvre, comte de Lagrange, plus jeune que lui de six années. Entre eux également l’entente est soudaine. Négligeant les dames, sans souci

  1. Même travestissement, mêmes commodités chez les saphistes. Ce n’est pas la moindre immoralité de ces liaisons, que l’absence de risque (entre personnes de la même classe) les favorise.