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VIII

L’amitié épurée et l’amitié pure. — Un exemple d’amitié pure, à la mode antique : Montaigne et La Boëtie.

Cette amitié épurée qui s’obtient par une transformation progressive, quelquefois douloureuse, de l’amour homosexuel, il ne faut pas la confondre avec l’amitié telle que nous l’entendons couramment aujourd’hui.

L’amitié qui est pour nous la vraie, l’amitié dès le principe étrangère au désir, l’amitié pure, les anciens ont mis des siècles à en former nettement l’idée : c’est que ce mouvement de l’âme, qui diffère de l’amour mais qui passe cependant en chaleur la sympathie banale et l’altruisme impersonnel, n’est pas un sentiment simple, comme l’appétit sensuel ou comme l’attachement de la mère à son fruit. En raison de cette complexité, par le seul fait qu’il était un mélange d’éléments divers : attirance instinctive, parenté morale, affinité intellectuelle, etc., ce sentiment de l’amitié proprement dite offrait aux sophistes