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marylka

muette. Regrettait-elle, la chère créature, d’avoir poussé son petit-fils dans cette voie périlleuse ? ou bien avait-elle l’amère prescience de l’éternel adieu qu’ils allaient échanger ?

Au moment du départ, elle l’avait béni, pressé courageusement contre son cœur, et très bas, dans un balbutiement qui avait été pour lui le suprême viatique tout le temps qu’avait duré cette malheureuse campagne, elle avait murmuré : « Je suis fière de mon fils ! »

La lutte avait alors commencé. Lutte implacable du faible écrasé par le nombre. Et puis, les armements insuffisants, le manque de vivres, les marches forcées à travers les marais où l’on enfonçait jusqu’au-dessus du genou !…

À la fin, traqué, démoralisé, livré par un espion, il avait été blessé, fait prisonnier et envoyé en Sibérie.

Et quand, après dix longues années de déportation, il était rentré, ignorant de ce qui s’était passé pendant son absence, il avait compris, au douloureux silence qui avait