Page:Poradowska - Marylka, 1896.djvu/153

Cette page a été validée par deux contributeurs.
145
marylka

La route plate et aride aboutissait au cimetière, et il fallait toute la magie merveilleuse d’un soleil couchant pour mettre un voile de poésie sur ce coin désolé.

Lia marchait si rapidement qu’il était difficile de la suivre. Arrivée près du mur funèbre, la juive fit un crochet, parut s’orienter, puis brusquement enfila un petit sentier et disparut. À ce moment une troupe de soldats parut dans le chemin : Marylka effrayée n’eut que le temps de se jeter dans le cimetière dont la grille était entr’ouverte.

C’était un vaste champ d’une tristesse infinie, planté d’arbres noirs, semé de tombes délabrées qui s’effritaient, dévorées de salpêtre.

Marylka s’était mise à marcher au hasard, mais elle avait l’âme oppressée à cause de l’idée de tous ces morts entassés là en cet espace restreint, depuis tant d’années. Dans les grandes plaines de Podolie, on ne marchandait point avec une telle parcimonie la