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marylka

voyant découverte, elle dit très vite, d’une voix à peine distincte, car ce coin du jardin lui est interdit :

« Pardon ! »

Et elle veut s’éloigner, mais Marylka la retient.

« Non, non, restez ! Vous êtes Lia, n’est-ce pas ?… Je me souviens de vous. »

Un mélancolique sourire de gratitude effleure les lèvres de la jeune juive, et, sans répondre, hypnotisée, semble-t-il, par cette mer vivante qui avance toujours et dont chaque vague est un flot de têtes humaines, elle se remet à sa contemplation, et l’on devine que ses prunelles fixes, qui brûlent d’un feu obscur, scrutent chacun de ces visages hâlés, comme si elles espéraient toujours voir surgir celui ardemment désiré.

Aux uhlans ont succédé les dragons, et maintenant ce sont les fantassins qui défilent, plus harassés, plus couverts de poussière encore. Ils défilent, aux sons bruyants des cui-