Page:Pontmartin - Nouveaux Samedis, 1re série, 1872.djvu/308

Cette page n’a pas encore été corrigée
298
NOUVEAUX SAMEDIS.

minisire travaillaient au même but, écoutaient la même ambition, obéissaient au même sentiment national, et qui n’eût été, au fond, qu’un duel clandestin où le serviteur ne réussissait pas à cacber sa supériorité blessante, où le maître cherchait à contenter son infériorité jalouse ? M. Camille Rousset a-t-il eu tort, avait-il besoin de diminuer Louis XIV pour amplifier Louvois ? La question est grande, plus grande que Louvois et même que Louis XIV. On pourrait, sans paradoxe, la rattacher à tout un ensemble : l’ensemble des rapports de la monarchie absolue avec les hommes qu’elle emploie ; du bien et du mal qu’elle leur fait, suivant qu’elle utilise leurs aptitudes, surexcite leur émulation, centralise leur œuvre, double leur talent du désir de plaire, ou bien leur communique quelque chose de ses vices et les force de surenchérir sur ses propres excès. Là est Louvois tout entier, et par là s’explique ce que ses relations avec Louis XIV eurent de fécond et d’orageux, de puissant et de troublé, de grandiose et de funeste : par là peuvent s’éclaircir les doutes qui planent encore sur les vrais sentiments de Louis XIV pour son formidable auxiliaire : par là enfin, — et c’est ce qui nous intéresse le plus, — la responsabilité des fautes se partageant entre les institutions et les hommes, il est facile de déduire la moralité de cette histoire.

II

Le dix-septième siècle, ses personnages célèbres, et le grand roi lui-même, ont subi, depuis soixante ans, des