Page:Pontmartin - Nouveaux Samedis, 19e série, 1880.djvu/240

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parcourait son diocèse sur un âne dont la bastière (couverture), étalait ces mots brodés par une main pieuse : « l’évêque de Digne. » — L’admirable plage de Cannes, que je voyais pour la première fois, me plongeait dans une sorte de paresse contemplative dont j’aurais bien dû ne plus me départir. Au lieu de répondre, j’allai faire une immense promenade dans les bois de l’Estérel.

Quelques jours après, causant avec mon ami l’abbé C.., fort spirituel et fort lettré, je me souvins tout à coup de la requête de mon directeur, et je dis à l’abbé :

— Ces Parisiens sont superbes ! voilà un homme qui prétend régenter l’opinion, et qui ne sait pas un mot de géographie ! Il se figure, j’en suis sûr, que Cannes est un faubourg de Digne !

— Hé ! hé ! murmura l’abbé, cette fois, son ignorance ou son erreur ne l’avait pas trop mal inspiré…

— Que voulez-vous dire ?

— Que, s’il vous fallait un renseignement véridique sur Mgr Miollis, c’est à Grasse, bien près d’ici, que vous pourriez le recueillir… Grasse, dont le climat est encore plus doux que le nôtre et qui n’a pas eu de lord Brougham, pas de colonie cosmopolite, pour y décupler le prix des loyers, des terrains, des légumes et des côtelettes, Grasse est la Sainte-Périne, le refuge préféré des invalides du sanctuaire, des vieux prêtres, des vieux chanoines que leur âge et leurs infirmités forcent de prendre leur retraite, et qui nous arrivent des diocèses de Gap, de Digne et de