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CAUSERIES LITTÉRAIRES.

reprendre. Desoiivrages que leurs auteurs ne nous permettraient certainement pas de comparer auMisaiithrope, Mademoiselle de la Seigliere, par exemple, ouïes jolis Proverbes d’Alfred de Musset, se jouent encore, après dix ou douze ans, et, pourvu qu’on ait une soirée à perdre, on les revoit avec plaisir. Qui oserait jouer, qui se soucierait de revoir, après le feu tiré, Diane de Lys, h Question d’argent ou le Fils naturel ? Il semble que ces œuvres aient été écrites, préparées, annoncées, acclamées, que toutes les forces vives du théâtre qui les joue se soient concentrées et tendues pour le succès d’un moment : ce succès obtenu, tout est dit ; le lustre s’éteint, et la pièce, en elle-même, fait l’effet de ces édifices qui ont eu une destination spéciale, et qui, n’en ayant plus, se lézardent et s’écroulent. M. Scribe garde encore en province une assez nombreuse clientèle : en province, les comédies de M. Dumas fils sont impossibles. On le voit, si ces comédies réussissent et font parler d’elles au point d’effrayer les gens sages, si leur succès prend parfois, aux yeux des pessimistes, les proportions d’un scandale, ce succès du moins peut se résumer et se localiser ainsi : — Un publie les applaudit, et le public les laisse réussir.

Maintenant que nous avons essayé d’établir cette distinction importante, il nous sera plus facile de discuter le talent et le système de M. Dumas fils, le mérite de son œuvre et la légitimité de son triomphe.

Un mot d’abord sur ses antécédents dramatiques : la filiation et la physionomie de son Père prodigue s’en préciseront mieux. Sans avoir, nous le croyons, de vocation bien déterminée, il commença par rencontrer, dans le milieu même où il vivait, un de ces sujets dont la réussite est certaine, parce qu’elle repose, non pas sur les sentiments vrais du cœur humain, mais sur ses préten-