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fenêtre et la suivait du regard longtemps, bien longtemps jusqu’à ce qu’elle eût disparu à l’angle de l’allée forestière qui conduisait chez Jacomet.

Puis elle fermait brusquement la croisée et, souvent, une larme roulait silencieuse sur sa joue pâlie.

D’où venait cette affection si grande pour l’enfant ?

Un homme aurait pu le dire : c’était Jacomet.

Et Jacomet savait bien autre chose encore.

Jacomet aurait pu raconter l’histoire suivante :

Il y avait alors vingt-sept ou vingt-huit ans, et au lieu de vivre de son métier de bûcheron, il était braconnier.

On le voyait souvent au château des Roches, où il rendait quelques menus services.

C’était lui qui fournissait la cuisine de gibier ; lui qui avait le premier conduit M. Henri, dès l’âge de dix ans, à l’affût du sanglier et à la chasse du loup.

Jacomet était le fils d’un maquignon de Mailly-la-ville ; il avait été élevé dans les chevaux, comme on dit, et mai demoiselle Diane, alors cette enfant rieuse et charmante dont nous avons parlé, l’avait chargé du soin de lui dresser une belle pouliche noire appartenant à cette vaillante petite race berrichonne qu’on appelait la race charbonnière.

Jacomet accompagnait donc souvent mademoiselle Diane dans ses promenades à cheval.

Un soir, en été, tous deux chevauchaient côte à côte sur les bords de l’Yonne, en amont, du côté de Chastel-Censoir. Le temps était orageux, et quelques gouttes de pluie commençaient à se dégager d’un ciel couvert de gros nuages noirs.

— Jacomet, dit la jeune fille, mets ton cheval au galop