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Tantôt c’était un chasseur qui sortait des grands bois, son fusil sur l’épaule.

Quelquefois les bateliers ou les flotteurs qui descendaient de Clamecy à Auxerre et passaient sous les fenêtres des Roches, apercevaient, bien avant dans la nuit, une lumière qui brillait tantôt dans une tour, tantôt dans une autre.

C’était sans doute un signal convenu dès longtemps et compris au loin.

Mais ni les paisibles habitants de la contrée, ni les flotteurs, ni les mariniers ne s’étaient jamais livrés à aucun commentaire.

L’orage révolutionnaire avait passé sur le manoir des Roches sans effleurer une ardoise de sa toiture.

Henri était aimé. Il n’était pas fier, il tirait bien. En Bourgogne et en Morvan, la terre classique du braconnier, un homme qui tire bien est sacré.

On ne s’était pas souvenu, aux plus mauvais jours de 93, que Henri était noble, qu’il était comte, qu’il avait été seigneur et qu’on lui avait payé la taille et la corvée…

Il était bon garçon, buvait sec et ne manquait jamais un lapin au débuché.

Comment aurait-on pu supposer que M. de Vernières conspirait ?

Et, de fait, Henri ne conspirait pas. Ployé, depuis le mariage de sa cousine, sous le poids d’une grande douleur, il ne se mêlait d’aucune intrigue politique et passait sa vie à la chasse.

Mais, en revanche, mademoiselle Diane conspirait contre cette République sanglante dont Robespierre avait tenu le