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d’avoir songé à cette excentricité ; mais le service que vous me demandez n’est-il pas en trois parties ? acheva madame Tallien.

— Oui, madame.

— Et bien ! voyons la troisième ?

— Deux de mes amis et moi, continua le prétendu cuisinier avec un accent d’ironie voilée, ont entendu dire merveille des bals du citoyen Barras.

— Ils sont forts beaux, en effet… quand j’y suis… répondit madame Tallien avec une petite moue pleine de coquetterie.

— Un peu mêlés peut-être, ricana le prétendu cuisinier ; mais il ne faut pas être rigoureux sur l’étiquette. À régime nouveau, mœurs nouvelles.

— Après, baron, après ?

— Donc, mes deux amis et moi nous avons grandement envie de voir la fête de cette nuit.

À cette demande si simple en apparence, madame Tallien se troubla et étouffa un cri :

— Vous êtes fou, baron, dit-elle.

— Pourquoi cela, madame ?

— Mais parce que vous oubliez que vous êtes proscrit encore.

— Qu’importé ?

— Condamné à mort par contumace, je crois.

— Je me porte bien malgré cela.

— Soit ; mais si vous veniez à Grosbois cette nuit, vous y trouveriez nombreuse compagnie.

— Je l’espère bien.

— On vous reconnaîtrait.