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vivre qui soit la vraie morale. Maîtres de notre petit monde, sachons nous en contenter et y passer des jours sans trouble, soustraits le plus possible à la merci de la fatalité et du hasard. Pour cela, que faut-il ? Deux choses : s’affranchir des terreurs de l’ignorance et briser l’obstacle qu’opposent à notre bien-être les forces de la nature. Le jour où, grâce à la science et à l’industrie, la terre sera devenue commode et riante au point de ne plus nous laisser le désir d’une autre patrie, ni le besoin de chercher, avec ou sans télescope, par-delà le monde visible un introuvable paradis ; le jour où l’on se contentera d’un horizon sagement limité, sans perspective décevante ; le jour surtout où l’activité des passions et leur satisfaction dans les bornes prescrites paraîtront légitimes, le but sera définitivement atteint.

Et quand même on n’y parviendrait jamais, l’effort serait encore honorable. La recherche éternelle de la vérité ne vaut-elle pas mieux que la vérité elle-même possédée et dès lors étroite ? Ces principes ont cela de bon qu’ils débarrassent l’esprit des effrois de l’enfance et