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homme d’affaires, songent moins à produire des œuvres consciencieuses qu’à les vendre le plus cher possible. Je ne leur en fais pas un crime, quoique l’on puisse reprocher à quelques-uns d’avoir un peu trop l’œil au pécule et de viser plus à l’argent qu’à l’estime. Sainte-Beuve n’avait pas tant d’âpreté au gain ; il composait par plaisir, pour se satisfaire et aussi par un sentiment secret du devoir. Son rêve du côté de la richesse était l’aurea mediocritas : ne pas jeter un éclat de financier aux yeux des passants, et ne pas les attrouper non plus autour de ses misères.

La crainte de n’avoir pas de quoi soutenir ses vieux jours, qui rend tant de gens sourds aux cris de la souffrance, n’avait pas de prise sur lui. Quand il songeait aux années de l’extrême vieillesse, il en envisageait la perspective en souriant et sans nul effroi : « Bah ! nous nous en tirerons. Avec ce que j’ai, la pension à laquelle j’aurai droit comme professeur, le produit de mes livres et quelques économies, nous arriverons bien à mille francs de revenu par mois. Il ne m’en faut pas plus. Nous achèterons