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Tu seras noble et douce, et tout simplement bonne,
     Humble appui de ta mère, et sa fraîche couronne,
     La dernière que tard elle voudra garder.
     Que ne puis-je à ses yeux par la main te guider,
     Jeune ange ; que ne puis-je, en longues matinées,
     Suivre avec toi les bords de tes jeunes années,
     Et dans l’odeur première, aisée à retenir,
     Au fond du vase élu fixer mon souvenir ?
     — À peine tu sauras mon nom, sans rien d’intime.
     Ces visites, enfant, qu’on cache comme un crime,
     Si rares qu’elles soient, vont cesser aussitôt
     Que ta langue achevée aura dit tout un mot,
     Et qu’heureuse, empressée à ravir la parole,
     Rivale en sons joyeux de l’abeille qui vole,
     Tu pourras sans obstacle à chacun raconter
     La vie et ses douceurs, et qu’on t’a fait monter
     Bien haut, dans une chambre étroite, et retirée,
     Mais où ton bon ami t’a de joie entourée…

N’est-ce pas là, dites, un charmant verbiage, une caresse de quasi-paternité admirablement rendue ? Ce qui suit est plus délicat, s’il se peut :

     Enfant, mon lendemain, mon aube à l’horizon,
     Toi ma seule famille et toute ma maison,
     C’est bonheur désormais et devoir de te suivre :
     Elle manquant, hélas !… pour toi j’aurais à vivre.
     Pour ta dot de quinze ans j’ai déjà de côté
     L’épargne du travail et de la pauvreté ;