Page:Poncy - Poésies, vol. 1, 1867.djvu/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 11 —


Tes vaisseaux sont chargés des enfants de l’Alsace
Que, de leur sol ingrat, la misère au loin chasse.
Pauvres oiseaux qui vont, loin de leurs nids natals ;
Demander, désormais, aux plaines africaines
Le pain que leurs sillons refusent à leurs peines,
Et, peut-être, servir de pâture aux chacals.

Oh ! que j’aime, Toulon, ta rade et tes collines !
Tes pavillons flottant au bout des brigantines
Comme autant d’arcs-en-ciel ; tes vastes arsenaux ;
Ton escadre ; et tes forts qui, sombres sentinelles,
Roulent, pour te garder, ainsi que des prunelles,
Le bronze des canons dans l’œil noir des créneaux !

J’aime quand le soleil pénètre dans les ondes,
À suivre de leurs flots les courses vagabondes.
J’aime à les voir mourir, en murmurant, au bord,
Où, parmi les rochers qui pavent les rivages,
On dirait que la lune, en perçant les nuages,
Fait pleuvoir des étoiles d’or.

Sur le groupe de toits qui dans ton sein fourmille,
J’aime à chercher celui qu’habite ma famille.
Là… j’aime à caresser un tendre souvenir :
Un poème inédit d’amour et de jeunesse,
Une fleur qu’en mon sein je cache avec ivresse
Et que rien n’y saurait ternir !