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Et l’Isola-Bella, dont le beau front s’élève,
Comme un palais de fée au sein du lac Majeur.

J’aimerais à fouiller ces déserts monotones.
Où des hymnes de mort, par les vents récités,
Évoquent chaque nuit ces vieilles Babylones
Dont il ne reste plus que des troncs de colonnes,
Glorieux ossements des antiques cités.

Surtout quand le labeur me fait sentir sa chaîne,
Quand la douleur m’abreuve à son calice amer,
Je voudrais qu’un navire aux bordages de chêne,
M’emportât sur ces flots où nul port ne s’enchaîne,
Où l’on n’aperçoit plus que le ciel et la mer.

Là, je contemplerais l’infini face à face.
Mes regards plongeraient dans le profond ravin
Que l’orage des mers déblaie à leur surface.
Là, j’entendrais les flots, abîme où tout s’efface,
Chanter leur opéra grandiose et divin.

Ô mondes d’harmonie où la mer se balance !
Océaniques rocs par la foudre clivés !
Aubes ! noirs ouragans ! calmes ! nuits de silence !
Saisi d’un saint transport, mon cœur vers vous s’élance
Du fond de mes chantiers où mes jours sont rivés !