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Ainsi donc les fleurs fleuriront
Au printemps, et se faneront
En automne, sans cause aucune ;
Les soleils deviendront des lunes.
Les saisons viendront, s’en iront,
À propos de rien, pour des prunes ;

Toi-même, misérable Adam,
Tu perdras ton cheveu, ta dent.
Pour Ève, il en ira de même.
Telle est ma volonté suprême. »

Là-dessus, l’excellent Bon Dieu
Rentra dans son propre milieu.
Et tout se passa de la sorte
Qu’il avait dit. On s’en rapporte…

Or, un jour qu’il déambulait
Dorlotant on ne sait quel rêve,
Il rencontra notre mère Ève
Qui sanglotait, se désolait
Au bord d’une claire fontaine :
« Ève, dis-moi quelle est ta peine ?
Adam t’a-t-il fait du chagrin ? »

Elle dit : « Ô mon souverain !
Non, non, Adam est un brave homme
Qui m’aime… mais regarde comme
Je deviens laide. Quel affront !
Vois cette ride sur mon front ;
Qu’est-ce que cela signifie ?
L’aurai-je donc toute ma vie ?