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« Je n’ai vécu que trop d’années,
Et j’aspire à l’éternel soir ;
Car dans mes prunelles fanées
Le Monde se reflète en noir.

« Je n’attends plus rien de la Vie.
Compte, au lieu de me l’acquérir,
À la Jeunesse inassouvie
Le temps qu’il me reste à courir. »

Et voilà que soudain, blafarde,
Sous son masque de carnaval,
Il vit l’effroyable camarde,
Debout sur son seuil, à cheval !

« Enfin ! dit-il. Que tu m’es bonne,
Toi, qui si longtemps me leurras ! »
Et tout ainsi qu’à la Madone,
Il lui tendit ses maigres bras.

Mais elle éperonna sa bête,
Et continua son chemin,
Sans seulement tourner la tête
Vers ce vieillard en parchemin.


Plus loin, au milieu des prairies,
Deux amants, ceux-là bien vivants,
Couraient dans les herbes fleuries,
Vous eussiez dit de deux enfants.