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À côté du Marly de Sardou c’est un trou.
Car vous supposez bien, n’est-ce pas ? qu’un critique
Ne gagne pas autant qu’un auteur dramatique.
Sur ce bout de terrain, j’ai fait construire un rien
De maison, grande assez pour un végétarien,
Un petit cafourniau, manière de cahute
Que disloque la pluie et que le vent chahute…
Mais, quand ce ne serait qu’un gourbi de fourmis,
Qu’importe, est-il pas vrai, s’il y vient des amis !
Du plus modeste toit le sage se contente.
Pour un rien, il irait coucher sous une tente.
Or, dimanche dernier — je veux dire jeudi,
J’étais donc à Nanterre, ainsi que je l’ai dit.
Le soir, après dîner, avec ma chère femme,
Je prenais mon café, pur moka, vrai dictame,
Je prenais mon café — dis-je — quand, dans la nuit,
Et, dans ma propre cour, il se fit un grand bruit.
On eût dit comme de quelqu’un que l’on étrangle.
J’étais un peu déboutonné, je me ressangle.
— Restez-la, restez — fis-je, à Madame Sarcey…
Passez-moi le flambeau, je vais voir ce que c’est.
D’abord je ne vis rien qu’un horrible mélange
D’os et de chairs meurtris qui traînaient dans la fange,
Et que mon bon chien Trac se disputait tout seul.
Je devins aussitôt pâle comme un linceul,
Car un homme était là gisant — quelque escogriffe !
Que Trac vous houspillait du croc et de la griffe.
J’eus une peine énorme à le faire lâcher ;
Tout de même, il finit par aller se coucher.
Quant à l’autre, je dis : « Qu’est-ce qu’à pareille heure,