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Sur son île flottante, il vit, il aime, il dort :
Cette feuille est son tout, son monde, son domaine ;
Il glisse, et ne sent pas le courant qui l’entraîne ;….
Mais lui ! — C’est encor peu du gouffre qui l’attend ;
Il le voit, le connaît, le sonde en y tombant !…

      Muse ! fatale enchanteresse !
C’est toi qui nous remplis de cette folle ardeur,
De ces désirs, mêlés de craintes et d’ivresse,
Dont le flux et reflux nous fatigue le cœur !
      C’est toi dont le miroir magique
Éblouit nos regards d’un reflet incertain,
      Semblable au rayon fantastique
Que l’enfant, sur les murs où le poursuit sa main,
Voit passer mille fois et repasser en vain.
Eh quoi ! toujours nourrir l’ambition de plaire !
Toujours peindre, sentir et penser pour autrui !
Ne saurions-nous jamais perdre des yeux la terre,
Et, n’aimant que le beau, ne l’aimer que pour lui ?

Regarde : l’air est doux ; le jour luit, l’eau murmure ;