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Dans les tribunaux de police correctionnelle, le rapport du nombre des condamnés à celui des accusés a été compris entre 0,86 et 0,85, d’après la moyenne de neuf années consécutives et pour la France entière ; mais cette donnée ne suffit pas pour déterminer la probabilité, avant le jugement, de la culpabilité de l’accusé, et la probabilité qu’un juge de ces tribunaux ne se trompera pas dans son vote. En supposant les jugements prononcés par trois juges, ce qui paraît avoir lieu généralement, il faudrait aussi savoir suivant quelle proportion les condamnations ont eu lieu à l’unanimité, ou à la simple majorité de deux voix contre une ; proportion qui ne nous est pas donnée par l’observation, et à laquelle on ne pourrait suppléer que par quelque hypothèse gratuite.

On manque aussi des deux données nécessaires pour déterminer, dans le cas des tribunaux militaires, les valeurs spéciales des deux éléments contenus dans les formules de probabilités. Les conseils de guerre se composent de sept juges ; les condamnations ne peuvent être prononcées qu’à la majorité d’au moins cinq voix contre deux ; on évalue leur nombre total aux deux tiers de celui des accusés ; mais on ignore la proportion de celles qui ont lieu, soit à l’unanimité, soit à une simple majorité ; et faute de cette donnée de l’observation, on ne peut pas comparer, avec précision, la justice militaire à celle des cours d’assises, sous le rapport de la chance d’erreur des jugements de condamnation et d’acquittement ; ce qu’il serait cependant très intéressant de pouvoir faire.

Lorsqu’il s’agit de jugements en matière civile, les formules de probabilités, au lieu de deux quantités spéciales, n’en contiennent plus qu’une, celle qui exprime la chance qu’un juge ne se trompera pas dans son vote. Les jugements des tribunaux de première instance sont rendus par trois juges, en général, selon le renseignement qui m’a été donné ; mais on ne connaît pas le rapport du nombre de cas où ils prononcent à l’unanimité, au nombre de cas où ils ne décident qu’à la simple majorité de deux voix contre une ; ce qui rend impossible de déterminer directement la chance d’erreur de leurs votes. Pour les jugements dont il est fait appel devant les cours royales, on peut calculer cette chance, en comparant le nombre de ceux qui sont confirmés au nombre de ceux qui ne le sont pas, et supposant que cette