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rejeter l’hypothèse d’où elle est déduite ; car personne, évidemment, n’accorderait une grande confiance à un tel jugement, et surtout la même confiance qu’à celui qui serait prononcé à la presque unanimité par les 1 000 jurés. Dans cette hypothèse, si la capacité des personnes portées sur la liste générale des jurés vient à changer, si elle est plus grande dans un pays que dans un autre, si elle est différente pour différentes sortes d’affaires, la probabilité des chances de ne pas se tromper augmente suivant le même rapport, pour celles qui se rapprochent le plus de l’unité et pour celles qui diffèrent le moins de  ; or, tel n’est pas ce qui a lieu réellement : quand cette capacité augmente, par une cause quelconque, les chances de ne pas se tromper les plus voisines de la certitude acquièrent une probabilité plus grande que celle qu’elles avaient auparavant ; et le contraire a lieu à l’égard de celles qui s’éloignent le plus de l’unité. En prenant pour une fonction qui puisse remplir ces conditions, et qui ne soit pas d’ailleurs absolument nulle ou insensible au-dessous de , on fera disparaître les difficultés que nous venons d’indiquer, mais elles sont insuffisantes pour déterminer la fonction  : une infinité de formes différentes de cette fonction continue ou discontinue, satisfont à ces conditions, et conduiraient à des valeurs très inégales de la probabilité , exprimée par la formule (15), pour un même nombre de jurés, et une même différence entre les nombres et .

Ainsi, d’après la connaissance de ces nombres dans une condamnation isolée, et soit que l’on suppose la probabilité antérieure égale à ou à toute autre fraction, on ne peut pas, comme nous l’avons déjà dit, déterminer la probabilité réelle de la bonté de ce jugement, qui dépend de la chance de ne pas se tromper, propre à chaque juré et que nous ne pouvons pas connaître ; mais on doit aussi regarder comme impossible de calculer ce que serait cette probabilité, pour quelqu’un qui saurait seulement que les jurés ont été pris au hasard sur la liste générale, et pour qui la raison de croire à la bonté du jugement ne dépendrait plus que de la chance moyenne de ne pas se tromper, relative à cette liste et commune aux jurés (no 122) ; car, pour ce calcul, on serait obligé de faire, sur la loi de probabilité des valeurs de la chance moyenne de-