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chance, depuis jusqu’à , sont toutes également probables. La seule raison qu’il donne de cette double supposition est que l’opinion du juge a plus de tendance à la vérité qu’à l’erreur. Mais, en partant de ce principe, on en conclurait seulement que la fonction par laquelle nous avons exprimé la loi de probabilité des valeurs de la chance moyenne, doit être une plus grande quantité pour les valeurs de qui sont au-dessus de que pour celles qui sont au-dessous ; condition qui peut être remplie d’une infinité de manières différentes, sans qu’on soit obligé de supposer pour , et cette fonction constante pour . L’hypothèse que nous examinons n’est donc pas suffisamment motivée à priori ; et, comme on va le voir, les conséquences qui s’en déduisent la rendent tout-à-fait inadmissible.

En effet, la formule (15), qui est une de ses conséquences nécessaires, ne renferme rien qui dépende de la capacité des personnes portées sur la liste générale des jurés ; quelqu’un qui saurait, par exemple, que deux condamnations ont été prononcées à une même majorité, et par des jurys d’un même nombre de jurés, mais pris sur deux listes différentes, aurait donc la même raison de croire que ces deux jugements sont erronés, quoiqu’il sût que les personnes portées sur l’une des listes ont une capacité bien supérieure à celle des personnes portées sur l’autre ; or, c’est déjà ce qu’il est impossible d’admettre.

La fraction étant plus petite que , quand l’accusé est condamné à la majorité de voix contre  ; la quantité est zéro ou insensible dans l’hypothèse que nous examinons, ce qui rend la probabilité de la culpabilité du condamné très approchante de l’unité, lorsque le nombre est très grand, et quel que soit l’excès de sur (no 129). Ainsi, par exemple, en supposant le jury composé de 1 000 jurés, et l’accusé condamné par 520 jurés et acquitté par 480, on devrait regarder comme à peu près certain le fait de sa culpabilité, quoiqu’il soit nié par ces 480 jurés, pour lesquels on suppose que la chance de ne pas se tromper a été la même que pour les 520 autres ; conséquence qui suffirait pour faire