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discontinue, telle que l’on ait , et susceptible des mêmes remarques que l’on vient de faire relativement à .

(124). Les formules précédentes donneraient les solutions complètes de toutes les questions relatives à l’objet de ce chapitre, si avant le jugement, la probabilité de la culpabilité était connue, et que l’on connût aussi, pour chaque juré et dans chaque affaire, la probabilité qu’il ne se trompera pas ; ou bien, si cette chance de ne pas se tromper a plusieurs valeurs possibles, il faudrait que toutes ces valeurs fussent données, ainsi que leurs probabilités respectives ; ou bien encore, quand ces valeurs sont en nombre infini et ont chacune une probabilité infiniment petite, il serait nécessaire que nous connussions la fonction qui exprime la loi de leurs probabilités. Mais aucun de ces éléments indispensables ne nous est donné à priori. Avant que l’accusé paraisse devant le jury, sa mise en accusation et la procédure qui la déterminée, rendent sans doute sa culpabilité plus probable que son innocence ; il y a donc lieu de croire que surpasse , mais de combien ? Nous ne pouvons aucunement le savoir d’avance. Cela dépend de l’habileté et de la sévérité des magistrats chargés de l’instruction préliminaire, et peut varier dans les différents genres d’affaires. Nous ne pouvons pas non plus connaître, soit avant le tirage au sort sur la liste des citoyens qui peuvent être jurés, soit après ce tirage, la chance qu’un juré ne se trompera pas : elle dépend, pour chaque juré, de ses lumières, de l’opportunité qu’il attache à la répression de telle ou telle sorte de crimes, de la pitié que lui inspire l’âge ou le sexe de l’accusé, etc. ; toutes circonstances oui nous sont inconnues, et dont nous ne pourrions pas d’ailleurs évaluer en nombres, l’influence sur les votes des jurés. Il est donc nécessaire, pour qu’on puisse faire usage des formules précédentes, d’en éliminer les éléments inconnus qu’elles renferment ; c’est ce qui va maintenant nous occuper.

(125). Considérons le cas où la chance de ne pas se tromper est égale pour tous les jurés. On suppose qu’elle soit inconnue avant le jugement, et susceptible de toutes les valeurs possibles depuis zéro jusqu’à l’unité, et l’on représente par la probabilité infiniment petite d’une valeur de cette chance. Si cette valeur était certaine, c’est-à-dire si la chance de ne pas se tromper était certainement pour