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Pendant ces deux années 1832 et 1833, le nombre des procès politiques, soumis aux cours d’assises, a été considérable ; on l’a retranché du nombre total des procès criminels, dans l’évaluation qui a donné 0,41 pour la proportion des acquittements ; en y ayant égard, on trouve que cette proportion s’élèverait à 0,45 ; ce qui montre déjà l’influence du genre des affaires sur le nombre des acquittements prononcés par les jurys. Cette influence est rendue tout-à-fait évidente dans les Comptes généraux : les procès criminels y sont classés en deux divisions principales ; ceux qui ont pour objet des vols ou autres attentats contre les propriétés ; ceux qui se rapportent aux attentats contre les personnes, et dont le nombre est environ le tiers de celui des premiers, ou le quart du nombre total des affaires. Depuis 1825 jusqu’à 1830, le rapport du nombre des acquittements à celui des accusés n’a été que 0,34 dans la première division, et dans la seconde, il s’est élevé à 0,52, c’est-à-dire que

    que le gouvernement vient de publier, on trouve que pendant cette année, où la législation a été la même que pour les deux années précédentes, le rapport du nombre des condamnés à celui des accusés, s’est élevé à 0,60 ; de sorte qu’il a seulement excédé d’un centième celui qui avait eu lieu en 1832 et 1833. Le gouvernement de la Belgique, à l’instar de celui de notre pays, a aussi publié le Compte général de l’administration de la justice criminelle dans ce royaume. Le jury ayant été rétabli vers le milieu de 1831, et la majorité nécessaire pour la condamnation étant d’au moins sept voix contre cinq, le rapport du nombre des acquittements à celui des accusés a été 0,41, 0,40, 0,39, pour les années 1832, 1833, 1834, et, ce qui est remarquable, sa valeur moyenne 0,40, n’a différé que d’un centième de ce qu’elle était en France à la même majorité. Avant le rétablissement du jury, les tribunaux criminels de la Belgique se composaient de cinq juges ; et les condamnations pouvaient être prononcées à la simple majorité de trois voix contre deux : le rapport du nombre des acquittements à celui des accusés, variait aussi très peu d’une année à une autre ; mais il s’élevait seulement à environ 0,17, ou à moins de moitié de celui qui a lieu pour les jugements des jurys. Cette différence de plus du simple au double, entre les proportions des acquittements, ne tient pas seulement aux nombres cinq et douze, des juges et des jurés, ni aux majorités minima, trois contre deux et sept contre cinq ; elle suppose aussi, comme on le verra dans cet ouvrage, que les juges exigeaient, pour les condamnations, une probabilité notablement moindre que les jurés, quelle que soit, d’ailleurs, la chance d’erreur pour les uns et pour les autres.