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Loriot, et, quand Billoin revint tout penaud sur ses pas, il les rencontra, courant à perdre haleine. Il leur cria :

— Pas la peine de trotter, il est loin, tonnerre de Dieu ! le galvaudeux.

Alors il conta sa mésaventure et affirma qu’on avait tiré sur lui, bien que le plomb fût tombé assez loin du buisson — guérite derrière laquelle il se dissimulait.

Le lendemain, il fit son rapport au marquis et à la gendarmerie qui ne se remua guère.

Elle estime, en effet, très logiquement, que les gardes n’auraient plus de raison d’être si elle s’occupait des braconniers.

Toutefois, Giraud pensa que la forêt n’était plus sûre pour lui pendant quelque temps.

Son père lui conseilla fortement l’abstention.

— Fais comme nous, fieu. Les gardes vont se lasser tout seuls. À force de ne rien trouver, ils se persuaderont que nous avons renoncé à l’affût. Et quand ils seront éreintés, nous serons reposés, nous autres. Laisse-les courir comme des chiens fous, gâs.

En attendant, il font peur au gibier et j’ai tué hier sur mon bien un chevreuil qu’ils m’avaient envoyé. J’avons plus besoin de rabatteur maintenant.

Faudra venir un de ces soirs avec moi, histoire de ne pas se défaire la main.

— Notre entreprise dans la forêt est presque finie, dit Giraud fils. Y a pas pour plus de huit jours de travail. J’ai envie de rentrer chez Beauvoisin, qui m’a demandé.

— Ma fine ! c’est une idée. On a trop de risques dans notre métier en ce moment. Ah ! ton coup du dix-cors est fameux par rapport à Billoin. Il a réussi, mais c’est sur nous tout de même que ç’a retombé.

— J’aurais pas pu supposer…

— Sans doute, interrompit le vieux braconnier, ni nous non plus. Enfin, ce qui est fait est fait. Va, vaut mieux que tu restes à la ferme de Beauvoisin. C’est plus sûr et puis t’as deux mioches à élever, tandis que moi, Lanfuiné et les autres, j’sommes plus que des vieux bons à rien, dont les