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sur ta bouche, tu seras à ton affaire. Seulement, tu sais, faudra pas fourrer tes cinq doigts dans les sauces. Devinez qui c’est, père Mathieu ?

— Je ne saurais quasiment point : seulement je disais tout à l’heure au fieu qu’il vous en faudrait une comme la bossue.

— Les anciens sont toujours de bon conseil, père Mathieu ; alors je suis enchanté de l’avoir reprise.

— Comment, c’est la Giraud que vous avez embauchée. Mais ses mioches qui qu’a va en faire ? Et puis son homme qui qu’i’va dire ?

— Les mioches restent chez les grands parents et j’ai engagé Giraud.

— Alors c’est différent. Le gâs est bon ouvrier, mais je crains ben que sa chasse ne le débauche.

Maître Beauvoisin leva les bras en l’air pour exprimer son ignorance et ses doutes. Cependant il ajouta :

— Oui certainement, mais du moment que la bossue habitera la maison…

Le vieux dodelina de la tête et murmura très bas :

— L’amour ça passe avant la passion de braconnier.

— Enfin qu’est-ce que vous voulez je n’y puis rien. À propos les vaches vont bien ?

— Très bien not’e maître.

— Dites donc, il me semble qu’ils n’ont plus rien à se fourrer dans le ventre sur cette pièce là. Il faudra les mener dans celle qui longe la route du Neubourg, vous savez bien, la pièce carrée. Bonsoir, père Mathieu.

Et il s’éloigna, toujours à grands pas, le fusil sur l’épaule, son épagneul devant, qui quêtait avec le même zèle les sillons absolument dépourvus de gibier.

Quelques jours après, Giraud et sa femme reprirent leurs postes d’antan.

Il tient à son porte-veine, dirent les cultivateurs.

On eut dit vraiment qu’il n’y avait pas eu d’interruption dans leur service.

Estelle s’était remise à astiquer la cuisinière, les casseroles, les poêles et les marmites avec l’entrain des anciens jours.