Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/164

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le brigadier Loriot avait tenté d’apaiser Billoin qui s’obstinait à passer les nuits :

— Voyons, prenez un peu de repos, que diable. Nous avons pincé deux braconniers ; le marquis est content. Les maraudeurs n’ont pas de raison de nous embêter. J’ai lancé quelques paroles en l’air. L’autre jour, j’ai causé dans une vente avec Giraud, pas le jeune, mais le vieux, et je lui ai dit :

— Vraiment ces bougres de braconniers ne sont pas intelligents ; s’ils ne démolissaient que de la bicherie, on les laisserait tranquilles ; tandis qu’ils ont la manie, je ne sais pourquoi, de s’attaquer aux cerfs.

Le bonhomme a répondu d’un air indifférent :

— Vous avez raison, bien que ce soit un vilain métier.

Mais ça n’a pas tombé dans les oreilles d’un sourd.

Vous pouvez dormir tranquille, aussi tranquille que Bourgougnon, qui nous l’a fait à la pose avec son braconnier.

Mais faut pas le blâmer, car M. le marquis est gentil maintenant. Bizais avec sa capture y a été aussi pour beaucoup.

— S’il est gentil avec vous, il ne l’est guère avec moi, grommela Billoin.

— Mon vieux, cela a été un peu de votre faute. Il ne fallait pas dire la vérité au marquis au sujet du cerf de la Saint-Hubert. En voilà une tuile qui nous est restée trop longtemps sur les épaules. Enfin c’est fini, oublié ; le château n’y pense plus. Faites comme lui : Et puis vos rondes ne servent qu’à effrayer les braconniers. Si vous renoncez, ils s’enhardiront et vous pourrez peut-être prendre votre revanche.

— J’y compte bien et le conseil me paraît bon. Il y en a un que je voudrais bien pincer.

— Le fils Giraud.

— Vous l’avez dit, brigadier. Rien ne m’ôtera de l’idée que c’est lui qui a fait le coup pour me faire attraper. Du reste sa bossue m’en veut, parce que je la surveille et que j’ai eu le tort de la blaguer sur sa tournure. Je ne pensais guère à cela, mais depuis l’idée m’est venue. La Saint Hubert tombait juste quelques jours après… Au fait vous ne savez pas, brigadier. La bossue revenait du marché de Beaumont par la forêt ; comme elle va lever les collets de son homme, je lui ai