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les arpents de neige

et peut-être ivre de whisky, avait suivi Dumont pour ainsi dire à la piste dans son exil, guettant l’occasion d’assassiner le Bois-Brûlé. Malheureusement pour lui, un des compagnons du fugitif l’ayant surpris un jour qu’il s’apprêtait à mettre à exécution son perfide dessein, une balle de revolver débarrassa à tout jamais Dumont de sa poursuite. Le meurtrier de Trim, l’homme qui, pour satisfaire sa sauvage passion, n’avait pas hésité à passer à l’ennemi et à livrer Batoche, n’était plus… Chacun se sentit soulagé d’apprendre que le châtiment avait enfin atteint le coupable…

— Fallait qu’y meure ! déclara gravement le vieil Antoine. Le ciel ne pouvait pas supporter que ce mauvais chien reste en vie.

Ce fut là toute l’oraison funèbre de Pitre-le-Loucheux.

Le lendemain, sur la fin de l’après-midi, Baptiste, son fils et Lacroix traversèrent la Saskatchewan pour aller rejoindre la diligence qui faisait alors le service entre Régina et les paroisses du Nord.

Ils durent l’attendre assez longtemps au relais. La lourde voiture apparut enfin. Un instant après, un homme en descendait, c’était Henry de Vallonges. Des exclamations d’étonnement jaillirent du groupe des Métis à la vue du Français. Nul d’entre eux ne s’attendait à son arrivée. Ils s’avancèrent vivement vers lui pour lui souhaiter la bienvenue, mais l’air grave, attristé, du jeune voyageur les troubla.

— Je viens d’assister au procès de Louis Riel,