Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/311

Cette page a été validée par deux contributeurs.
296
les arpents de neige

de lui prouver l’innocence du jeune homme, la poursuivait, l’obsédait sans cesse… Mais, comment s’y prendre ? à qui s’adresser ?

La réapparition de Lacroix lui avait semblé de bon augure. Lui, si bien renseigné jadis, avait su quelque chose, sans doute, des relations du cadet avec miss Clamorgan ; et, s’il en avait su quelque chose, il devait être convaincu, perspicace comme il l’était, de la bonne foi de Jean trompé par l’Anglaise… Le parti de la jeune Métisse fut vite pris : elle parlerait à Lacroix. L’après-midi même, ayant trouvé le moyen de le joindre à l’écart, elle lui exprima son désir d’un entretien particulier, et tous deux descendirent le sentier qui conduisait à la rivière…

— Lacroix, commença Rosalie sans préambule, avez-vous ouï parler de tout ce qu’on a débité su’le compte de Jean La Ronde pendant que vous étiez captif des Anglouais ?

— Oui, répondit-il, je suis au courant. M’sieu de Vallonges m’a tout conté les jours « icite », et c’est une chose vraiment « chucottante » de « vouère » qu’un gâs comme Jean qui est si honnête…

Est-ce pas ? s’écria la jeune fille avec feu… Est-ce pas que tout ça c’étaient des « menteries » ? Et dire, Lacroix, dire que le père croit que c’est des vérités !… qu’y n’y a pas moyen de lui tirer de l’idée que Jean La Ronde a trahi les Bouais-Brûlés !

Cette révélation surprit si fort le vieux trappeur qu’il s’arrêta tout net au milieu du sentier :

— Oh ! oh ! fit-il. Athanase n’y va pas de main-