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les arpents de neige

avait affaire à des éclaireurs. Ils conversaient en langue crise, mais, à divers indices, il crut reconnaître que tous deux n’étaient pas des Indiens.

— Mon frère voit-il là-bas, à gauche, deux gros pieds de kinnikinnik ? demandait l’un.

— Je les vois.

— Bon ! Alors que mon frère ouvre bien ses oreilles, je vais me glisser derrière ces troncs ; pendant ce temps, Corne-de-Buffle s’approchera le plus près qu’il pourra de ce groupe de batteurs d’estrade qui tire là-bas à cent pas sur les nôtres… Avec ma carabine, je les abattrai l’un après l’autre comme des « gophers »… Cette chose ne sera pas longue, et, dès qu’elle sera accomplie, Corne-de-Buffle bondira vers eux, prendra tous leurs fusils, mettra toutes leurs cartouches dans le sac qu’il a apporté. Est-ce dit ?

— C’est dit ! répondit l’Indien.

— Bon ! Et quand cette chose sera exécutée, nous en recommencerons de semblables jusqu’à ce que les gens qui viennent d’aller chercher d’autres munitions soient de retour…

L’inconnu achevait à peine sa phrase qu’une balle vint s’enfoncer dans le bois de l’arbre près duquel il se trouvait…

— Nous sommes vus, homme rouge !… Cachons-nous derrière ce tronc. Nous aviserons après.

La situation du transfuge devenait critique. Il était à peu près certain désormais d’être découvert. En conséquence, il dégagea doucement son revolver et se décida à lever la tête au-dessus de la souche. Les yeux en dépassaient à peine le niveau