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les arpents de neige

de longues flammes poussées par le vent, de longues flammes dévoratrices, jaillissaient de buissons en cépées et se dirigeaient ronflantes et grondantes vers les positions ennemies…

Abrités dans leurs rifles-pits, les Bois-Brûlés attendaient que ces terribles alliées eussent chassé devant elles les troupes canadiennes pour s’élancer à leur tour, les armes à la main…

Pendant près d’une demi-heure, ils écoutèrent la rumeur d’effarement qui perçait jusqu’à eux à travers un voile de feu et de fumée. Et quand, le sol s’étant un peu refroidi, on eut acquis la certitude que le général Middleton faisait évacuer l’église menacée par l’incendie, Riel, Dumont, Lépine, Nolin, crièrent à leurs hommes de s’élancer en masse sur les traces de la flamme.

Avec des hourras d’enthousiasme, les Bois-Brûlés bondirent hors de leurs tranchées. Mais il était déjà trop tard. L’artillerie anglo-canadienne, rapidement mise en ligne, les accueillit par une tempête d’obus et de mitraille.

À plusieurs reprises, ils tentèrent de s’emparer des pièces, mais, chaque fois, ils furent rejetés en arrière.

Enfin, après vingt minutes de lutte, force leur fut de battre en retraite vers les rifles-pits.

Le mouvement avait échoué. Des vides s’étaient faits dans leurs rangs.

Et lorsque le vieux François La Ronde se retrouva dans la tranchée avec Henry de Vallonges, ce fut en vain qu’il chercha ses deux petits-fils des yeux : Pierre et Jean La Ronde avaient disparu…