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un drapeau en danger

songer à prendre, en ce moment, l’offensive… Mais je vais mûrir une idée dont l’exécution, une fois la nuit tombée, nous aidera, je l’espère, à regagner le terrain perdu et à reconquérir notre drapeau.

Une seconde salve de hourras répondit à cette petite harangue du grand chef, et, immédiatement après, grâce à l’appoint des munitions fraîches, la fusillade reprit, du côté des demi-blancs, avec une intensité nouvelle…

…Deux heures s’écoulèrent encore sans que le plus léger avantage vint encourager les troupes du Gouvernement.

Au crépuscule, la brise se leva.

Riel et Dumont apparurent sur les positions. Ils conversaient avec animation.

— C’est une bonne idée, disait Dumont. Le vent est d’ouest… Ça va faire l’affaire. As-tu prévenu les Indiens ?

— Pas encore… Des éclaireurs sont retournés voir si le drapeau flottait toujours sur l’église. Il n’a pas bougé. C’est providentiel !

— Ça prouve aussi que les gens de la Puissance ont pas mal à faire avec nous, répliqua Dumont. Mais voici que la nuit tombe. Riel, m’est avis que le moment est venu de mettre notre projet à exécution.

Dix minutes s’écoulèrent…

Tout à coup, parmi la pénombre, le sous-bois très en avant des tranchées métisses s’éclaira de lueurs étranges et mouvantes ; des serpents de feu parurent s’étirer et ramper au ras du sol ; puis, ce furent des pétillements rapides et croissants qui montèrent dans la fusillade. Trois minutes après,