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un drapeau en danger

çois. Sûrement que Pierre et M’sieu de Vallonges ne vont pas tarder à s’en venir.

Au même instant, Gabriel Dumont, longeant la tranchée, arrivait à leur hauteur.

— La Rose n’est pas là ? demanda-t-il d’un ton fébrile qui ne lui était pas habituel.

— On ne l’a pas vu depuis ce matin, répondit Jean.

— Il a été tué en face de l’église, au moment qu’il voulait y entrer ! dit une voix plus loin.

— Tué ! mais, alors, notre drapeau ?

Les têtes, de toutes parts, se dressèrent. Chacun se souvenait, en effet, que le drapeau fleurdelisé des Bois-Brûlés ayant été confié à Prosper La Rose, un des notables de Batoche, cet homme avait eu l’idée de le planter, près de la croix, au sommet du clocher…

Dans la retraite un peu précipitée sur le bois parmi les obus et la mitraille, personne n’y avait plus songé au drapeau qui flottait encore sur la tour… Personne ? Si, La Rose, sans doute, puisqu’il avait été tué sur le seuil même de l’église à l’arrivée des Anglo-Canadiens dans le village… Mais une balle ayant fait échouer sa tentative, le précieux emblème qu’on lui avait confié devait être tombé aux mains de l’ennemi… À moins que, par un invraisemblable hasard, les soldats de la Puissance, trop occupés avec les Métis, n’y eussent pas encore pris garde.

— Il faut s’en assurer sur-le-champ ! ordonna Dumont.

— Y va-t-on ? crièrent vingt voix.

— Non, mes amis, non ! Il suffit d’un homme ou