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pendant le repos, mais restés inconscients, à revêtir la forme consciente.

Il y a une autre remarque à faire au sujet des conditions de ce travail inconscient : c’est qu’il n’est possible et, en tout cas, qu’il n’est fécond que s’il est, d’une part, précédé, et, d’autre part, suivi d’une période de travail conscient. Jamais (et les exemples que je vous ai cités le prouvent déjà suffisamment) ces inspirations subites ne se produisent sinon après quelques jours d’efforts volontaires, qui ont paru absolument infructueux et où l’on a cru ne rien faire de bon, où il semble qu’on a fait totalement fausse route. Ces efforts n’ont donc pas été aussi stériles qu’on le pense ; ils ont mis en branle la machine inconsciente, et sans eux elle n’aurait pas marché et elle n’aurait rien produit.

La nécessité de la seconde période de travail conscient, après l’inspiration, se comprend mieux encore. Il faut mettre en œuvre les résultats de cette inspiration, en déduire les conséquences immédiates, les ordonner, rédiger les démonstrations. Mais surtout il faut les vérifier. Je vous ai parlé du sentiment de certitude absolue qui accompagne l’inspiration ; dans les cas cités, ce sentiment n’était pas trompeur, et le plus souvent, il en est ainsi ; mais il faut se garder de croire que ce soit une règle sans exception ; souvent ce sentiment nous trompe, sans pour cela être moins vif, et l’on ne s’en aperçoit que quand on cherche à mettre la démonstration sur