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plus difficile de l’embrasser tout entière ; alors on cherche à la couper en morceaux, à se contenter de l’un de ces morceaux : en un mot, à se spécialiser. Si l’on continuait dans ce sens, ce serait un obstacle fâcheux aux progrès de la Science. Nous l’avons dit, c’est par des rapprochements inattendus entre ses diverses parties que ses progrès peuvent se faire. Trop se spécialiser, ce serait s’interdire ces rapprochements. Espérons que des Congrès comme ceux de Heidelberg ou de Rome, en nous mettant en rapport les uns avec les autres, nous ouvriront des vues sur le champ du voisin, nous obligeront à le comparer au nôtre, à sortir un peu de notre petit village ; ils seront ainsi le meilleur remède au danger que je viens de signaler.

Mais je me suis trop attardé à des généralités, il est temps d’entrer dans le détail.

Passons en revue les diverses sciences particulières dont l’ensemble forme les Mathématiques ; voyons ce que chacune d’elles a fait, où elle tend, et ce qu’on peut en espérer. Si les vues qui précèdent sont justes, nous devons voir que les grands progrès du passé se sont produits lorsque deux de ces sciences se sont rapprochées, lorsqu’on a pris conscience de la similitude de leur forme, malgré la dissemblance de leur matière, lorsqu’elles se sont modelées l’une sur l’autre, de telle façon que chacune d’elles puisse profiter de l’autre. Nous devons en même temps entrevoir, dans