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concret qui n’en est souvent qu’une image grossière. Dire que cet objet satisfait, au moins approximativement, à la définition, c’est énoncer une vérité nouvelle, que l’expérience peut seule mettre hors de doute, et qui n’a plus le caractère d’un postulat conventionnel.

Mais, sans sortir des mathématiques pures, on rencontre encore la même difficulté.

Vous donnez du nombre une définition subtile ; puis, une fois cette définition donnée, vous n’y pensez plus ; parce qu’en réalité, ce n’est pas elle qui vous a appris ce que c’était que le nombre, vous le saviez depuis longtemps, et quand le mot nombre se retrouve plus loin sous votre plume, vous y attachez le même sens que le premier venu ; pour savoir quel est ce sens et s’il est bien le même dans telle phrase ou dans telle autre, il faut voir comment vous avez été amené à parler de nombre et à introduire ce mot dans ces deux phrases. Je ne m’explique pas davantage sur ce point pour le moment, car nous aurons l’occasion d’y revenir.

Ainsi voici un mot dont nous avons donné explicitement une définition A ; nous en faisons ensuite dans le discours un usage qui suppose implicitement une autre définition B. Il est possible que ces deux définitions désignent un même objet. Mais qu’il en soit ainsi, c’est une vérité nouvelle, qu’il faut, ou bien démontrer, ou bien admettre comme un axiome indépendant.