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Je n’ai pas à revenir sur la définition de la vitesse, ou de l’accélération, ou des autres notions cinématiques ; on les rattachera avec avantage à celle de la dérivée.

J’insisterai, au contraire, sur les notions dynamiques de force et de masse.

Il y a une chose qui me frappe : c’est combien les jeunes gens qui ont reçu l’éducation secondaire sont éloignés d’appliquer au monde réel les lois mécaniques qu’on leur a enseignées. Ce n’est pas seulement qu’ils en soient incapables ; ils n’y pensent même pas. Pour eux le monde de la science et celui de la réalité sont séparés par une cloison étanche. Il n’est pas rare de voir un monsieur bien mis, probablement bachelier, assis dans une voiture et s’imaginant qu’il l’aide à avancer en poussant sur l’avant, et cela au mépris du principe de l’action et de la réaction.

Si nous essayons d’analyser l’état d’âme de nos élèves, cela nous étonnera moins ; quelle est pour eux la véritable définition de la force ? non pas celle qu’ils récitent, mais celle qui, tapie dans un recoin de leur entendement, le dirige de là tout entier. Cette définition, la voici : les forces sont des flèches avec lesquelles on fait des parallélogrammes. Ces flèches sont des êtres imaginaires qui n’ont rien