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pas la pierre philosophale qui nous permettrait de transmuter les uns dans les autres les métaux qui nous sont confiés ; tout ce que nous pouvons faire c’est de les travailler en nous accommodant à leurs propriétés.

Bien des enfants sont incapables de devenir mathématiciens, auxquels pourtant il faut enseigner les mathématiques ; et les mathématiciens eux-mêmes ne sont pas tous coulés dans le même moule. Il suffit de lire leurs ouvrages pour distinguer parmi eux deux sortes d’esprits, les logiciens comme Weierstrass, par exemple, les intuitifs comme Riemann. Même différence parmi nos étudiants. Les uns aiment mieux traiter leurs problèmes « par l’analyse » comme ils disent, les autres « par la géométrie ».

Il est bien inutile de chercher à y changer quelque chose, et cela d’ailleurs serait-il désirable ? Il est bon qu’il y ait des logiciens et qu’il y ait des intuitifs ; qui oserait dire s’il aimerait mieux que Weierstrass n’eût jamais écrit, ou qu’il n’y eût pas eu de Riemann. Il faut donc nous résigner à la diversité des esprits, ou mieux, il faut nous en réjouir.


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Puisque le mot comprendre a plusieurs sens, les définitions qui seront le mieux comprises des uns ne seront pas celles qui conviendront aux autres. Nous avons celles qui cherchent à faire