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hypothèses cosmogoniques

évidemment d’admettre que les premières sont principalement constituées par de l‘hydrogène et les secondes par des vapeurs métalliques. Nous avons vu que tel n’est pas l’avis de Sir N. Lockyer : celui-ci, invoquant sa théorie de la dissociation des éléments, admet qu’il n’y a pas de différence essentielle de composition chimique entre les astres, et que toutes les étoiles, dans leur évolution, sont destinées à parcourir les mêmes stades.

M. Schuster, au contraire, ne pense pas que les éléments chimiques soient dissociés. Il suppose, il est vrai, que les différentes étoiles ont même composition chimique moyenne. S’il n’y a pas de courants de convection, l’hydrogène, plus léger, apparaîtra à la surface (étoiles gazeuses) ; si, au contraire, des courants de convection produisent un brassage continuel, les vapeurs métalliques seront amenées dans les régions superficielles (étoiles métalliques).

177.Voici donc comment M. Schuster se représente l’histoire des grandes étoiles. La matière serait à l’origine répandue dans tout l’espace. Les chocs de ses diverses parties engendreraient de la chaleur en même temps qu’ils donneraient naissance à certains centres de condensation. L’attraction de ces centres serait au début insuffisante pour maintenir les éléments légers tels que l’hydrogène : en effet, dans la théorie cinétique, les molécules gazeuses ont des vitesses moyennes d’autant plus grandes que le gaz est plus léger ; les molécules d’hydrogène et d’hélium s’échappent donc, ou plutôt ne sont pas retenues par les centres d’attraction, tandis que les molécules de vapeurs métalliques, plus lourdes, sont captées : nous avons là l’étoile métallique de la branche ascendante des températures. Le centre d’attraction augmente peu à peu, et l’étoile se nourrit par bombardement ; sa masse devient bientôt assez considérable pour retenir d’abord l’hélium puis l’hydrogène : nous sommes au sommet de la courbe. La condensation augmentant encore, les gaz légers finissent par être absorbés par la masse centrale (comme l’hydrogène est absorbé par une masse de palladium) : nous arrivons à l’étoile métallique de la branche descendante.

Les spectres d’Arcturus et du Soleil (que Sir N. Lockyer plaçait dans le même groupe) diffèrent en ce qu’Arcturus ne présente pas les raies de l’hydrogène. M. Schuster suppose que cette étoile ayant une masse plus considérable que le Soleil, son noyau central aura plus vite absorbé l’hydrogène, qui aura ainsi abandonné son atmosphère.