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hypothèses cosmogoniques

chaud, on voit le spectre du corps s’enrichir en raies ; si l’on fait éclater l’étincelle entre deux fragments du corps, la température de l’étincelle étant encore supérieure à celle de l’arc, on voit de nouvelles raies apparaître, pendant que certaines des raies de l’arc se renforcent et que d’autres disparaissent.

Du fait qu’un même corps (un métal, par exemple) peut, suivant la température à laquelle il est porté, émettre soit les raies de l’arc, soit les raies renforcées ou celles de l’étincelle, Sir N. Lockyer croit pouvoir conclure que le corps s’est transformé ou dissocié, aux hautes températures, en corps plus simples qui n’existent pas à l’état libre aux températures usuelles[1]. Il nomme protométal la forme atomique du corps qui correspond aux raies de haute température (raies renforcées et raies de l’étincelle). Les protométaux seraient en quelque sorte des métaux en voie de formation, ceux-ci ne prenant naissance que lorsque la température est suffisamment abaissée.

171.Sir N. Lockyer cherche à suivre les transformations graduelles de la matière cosmique, à partir des météorites. Il pense qu’il faut voir dans l’état plus ou moins avancé de l’évolution des astres l’origine des différences que présentent leurs spectres.

Les nébuleuses nous offrent, selon Sir N. Lockyer, le premier stade de révolution cosmique. Il les considère comme formées par des essaims de météorites dont les chocs mutuels ont pour effet une condensation et une création de chaleur, produisant le dégagement des gaz inclus dans les météorites qui se heurtent : les gaz qui se dégagent et se répandent le plus facilement étant les plus légers ; on observera surtout les raies brillantes de l’hydrogène et de l’hélium.

La concentration se poursuivant, la nébuleuse se transforme en une étoile qui s’échauffe de plus en plus ; les météorites centrales non vaporisées donnent de la lumière continue ; celle-ci traverse l’atmosphère qui contient une faible proportion de vapeurs métalliques ; les raies métalliques commencent donc à apparaître sous forme de raies sombres.

Bientôt la température atteint son maximum : les raies de haute

  1. Il peut s’agir, suivant les cas, soit d’une simple transformation moléculaire comme celle de l’hydrogène, habituellement diatomique, qui devient monoatomique aux hautes températures ; soit d’une véritable dissociation de l’élément, comme l’hélium qui se séparerait réellement en deux constituants, l’hélium et l’actinium.