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LA VALEUR DE LA SCIENCE

invariablement lié à notre corps. On doit observer que rigoureusement l’on ne pourrait parler d’axes invariablement liés au corps que si les diverses parties de ce corps étaient elles-mêmes invariablement liées l’une à l’autre. Comme il n’en est pas ainsi, nous devons, avant de rapporter les objets extérieurs à ces axes fictifs, supposer notre corps ramené à la même attitude.


§ 5. — LA NOTION DU DÉPLACEMENT


J’ai montré dans Science et Hypothèse le rôle prépondérant joué par les mouvements de notre corps dans la genèse de la notion d’espace. Pour un être complètement immobile, il n’y aurait ni espace, ni géométrie ; c’est en vain qu’autour de lui les objets extérieurs se déplaceraient, les variations que ces déplacements feraient subir à ses impressions ne seraient pas attribuées par cet être à des changements de position, mais à de simples changements d’état, cet être n’aurait aucun moyen de distinguer ces deux sortes de changements, et cette distinction, capitale pour nous, n’aurait aucun sens pour lui.

Les mouvements que nous imprimons à nos membres ont pour effet de faire varier les impressions produites sur nos sens par les objets extérieurs ; d’autres causes peuvent également les