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LA MESURE DU TEMPS

écrivant cette lettre, j’en ai possédé l’image visuelle, et mon ami a possédé à son tour cette même image en lisant la lettre.

Bien que ces deux faits se passent dans des mondes impénétrables, je n’hésite pas à regarder le premier comme antérieur au second, parce que je crois qu’il en est la cause.

J’entends le tonnerre, et je conclus qu’il y a eu une décharge électrique ; je n’hésite pas à considérer le phénomène physique comme antérieur à l’image sonore subie par ma conscience, parce que je crois qu’il en est la cause.

Voilà donc la règle que nous suivons, et la seule que nous puissions suivre ; quand un phénomène nous apparaît comme la cause d’un autre, nous le regardons comme antérieur.

C’est donc par la cause que nous définissons le temps ; mais le plus souvent, quand deux faits nous apparaissent liés par une relation constante, comment reconnaissons-nous lequel est la cause et lequel est l’effet ? Nous admettons que le fait antérieur, l’antécédent, est la cause de l’autre, du conséquent. C’est alors par le temps que nous définissons la cause. Comment se tirer de cette pétition de principe ?

Nous disons tantôt post hoc, ergo propter hoc ; tantôt propter hoc, ergo post hoc ; sortira-t-on de ce cercle vicieux ?