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LA VALEUR DE LA SCIENCE

toutes deux leur rôle légitime. Mais il est intéressant d’étudier de plus près quelle est dans l’histoire de la Science la part qui revient à l’une et à l’autre.


II


Chose curieuse ! Si nous relisons les Œuvres des anciens, nous serons tentés de les classer tous parmi les intuitifs. Et pourtant la nature est toujours la même, il est peu probable qu’elle ait commencé dans ce siècle à créer des esprits amis de la logique.

Si nous pouvions nous replacer dans le courant des idées qui régnaient de leur temps, nous reconnaîtrions que beaucoup de ces vieux géomètres étaient analystes par leurs tendances. Euclide, par exemple, a élevé un échafaudage savant où ses contemporains ne pouvaient trouver de défaut. Dans cette vaste construction, dont chaque pièce, pourtant, est due à l’intuition, nous pouvons encore aujourd’hui sans trop d’efforts reconnaître l’œuvre d’un logicien.

Ce ne sont pas les esprits qui ont changé, ce sont les idées ; les esprits intuitifs sont restés les mêmes ; mais leurs lecteurs ont exigé d’eux plus de concessions.

Quelle est la raison de cette évolution ?