Toutes les lois sont donc tirées de l’expérience ; mais pour les énoncer, il faut une langue spéciale ; le langage ordinaire est trop pauvre, il est d’ailleurs trop vague, pour exprimer des rapports si délicats, si riches et si précis.
Voilà donc une première raison pour laquelle le physicien ne peut se passer des mathématiques ; elles lui fournissent la seule langue qu’il puisse parler.
Et ce n’est pas une chose indifférente qu’une langue bien faite ; pour ne pas sortir de la physique, l’homme inconnu qui a inventé le mot chaleur a voué bien des générations à l’erreur. On a traité la chaleur comme une substance, simplement parce qu’elle était désignée par un substantif, et on l’a crue indestructible.
En revanche, celui qui a inventé le mot électricité a eu le bonheur immérité de doter implicitement la physique d’une loi nouvelle, celle de la conservation de l’électricité, qui, par un pur hasard, s’est trouvée exacte, du moins jusqu’à présent.
Eh bien, pour poursuivre la comparaison, les écrivains qui embellissent une langue, qui la traitent comme un objet d’art, en font en même temps un instrument plus souple, plus apte à rendre les nuances de la pensée.
On comprend alors comment l’analyste, qui poursuit un but purement esthétique, contribue