Page:Poincaré - La Théorie de Lorentz et le principe de réaction.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Or il est aisé de reconnaître le problème qui a déjà été traité par Maxwell aux §§ 792 et 793 de son Ouvrage. Il prévoit aussi un recul du miroir tout pareil à celui que nous avons déduit de la théorie de Lorentz.

Si, en effet, nous pénétrons plus avant dans l’étude du mécanisme de ce recul, voici ce que nous trouvons. Considérons un volume quelconque et appliquons-lui l’équation (2) ; cette équation nous apprend que la force d’origine électromagnétique qui s’exerce sur les électrons, c’est-à-dire sur la matière contenue dans le volume est égale à la résultante des pressions de Maxwell augmentée d’un terme correctif qui est la dérivée de l’intégrale

.

Si le régime est établi, cette intégrale est constante et le terme correctif est nul.

Le recul prévu par la théorie de Lorentz est celui qui est dû aux pressions de Maxwell. Or toutes les théories prévoient les pressions de Maxwell ; donc toutes les théories prévoient le même recul.


§ 2

Mais alors une question se pose. Nous avons prévu le recul dans la théorie de Lorentz parce que cette théorie est contraire au principe de réaction. Or parmi les autres théories, il y en a, comme celle de Hertz, qui sont conformes à ce principe. Comment se fait-il qu’elles aussi conduisent au même recul ?

Je me hâte de donner l’explication de ce paradoxe, quitte à justifier ensuite cette explication. Dans la théorie de Lorentz et dans celle de Hertz l’appareil qui produit de l’énergie et l’envoie dans une direction recule, mais cette énergie ainsi rayonnée se propage en traversant un certain milieu, de l’air par exemple.

Dans la théorie de Lorentz, lorsque l’air reçoit l’énergie ainsi rayonnée, il ne subit aucune action mécanique ; il n’en subit pas non plus lorsque cette énergie le quitte après l’avoir traversé. Au contraire, dans la théorie de Hertz, lorsque l’air reçoit l’énergie, il est poussé en avant et il recule au contraire quand cette énergie le quitte. Les mouvements de l’air traversé par l’énergie compensent ainsi au point de vue du principe de réaction, ceux des appareils qui ont produit cette énergie. Dans la théorie de Lorentz, cette compensation ne se fait pas.