Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/90

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tels que chacun d’eux se déplace à peu près suivant les mêmes lois que les corps solides. Nous distinguons ainsi les « déformations » des autres changements d’état ; dans ces déformations chaque élément subit un simple changement de position, qui peut être corrigé, mais la modification subie par l’ensemble est plus profonde et n’est plus susceptible d’être corrigée par un mouvement corrélatif.

Une pareille notion est déjà très complexe et n’a pu apparaître que d’une façon relativement tardive ; elle n’aurait pu naître d’ailleurs si l’observation des corps solides ne nous avait appris déjà à distinguer les changements de position.

Si donc il n’y avait pas de corps solides dans la nature, il n’y aurait pas de géométrie.

Une autre remarque mérite aussi un instant d’attention. Supposons un corps solide occupant d’abord la position α et passant ensuite à la position β ; dans sa première position, il causera sur nous l’ensemble d’impressions A, et dans sa seconde position l’ensemble d’impressions B. Soit maintenant un second corps solide, ayant des qualités entièrement différentes du premier, par exemple de couleur différente. Supposons encore qu’il passe de la position α, où il cause sur nous l’ensemble d’impressions A′, à la position β, où il cause sur nous l’ensemble d’impressions B′.

En général, l’ensemble A n’aura rien de commun avec l’ensemble A′, ni l’ensemble B avec l’ensemble B′. Le passage de l’ensemble A à l’ensem-