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jusqu’à Mittlach. C’est un village traversé par un torrent qui va se jeter dans la Fecht, en amont de Metzeral. Lorsque nous avons été forcés d’abandonner Münster, les Allemands se sont avancée, non seulement jusqu’à Muhlbach et à Metzeral, mais jusqu’à Mittlach et ils y sont restés jusqu’au 26 avril. À cette date, ils ont failli y être surpris par nos troupes et se sont enfuis. L’école des filles a été installée dans l’église. Nous entrons. Une soixantaine de fillettes sont là. Deux seulement savent quelques mots de français. Deux me demandent, l’une en demi-français, l’autre en allemand, de faire revenir leurs pères, qui, suivant les procédés qu’a justement dénoncés Barrés et qui n’ont pas tout à fait cessé, ont été évacués et internés. Je prends note des noms et ferai le nécessaire. Une dizaine d’élèves sont costumées en Alsaciennes et me remettent des bouquets. La classe des petits garçons ne fonctionne elle-même que depuis une dizaine de jours. Je m’y arrête quelques instants, puis le maire, qui parle français, m’introduit dans la salle de la mairie et j’y lis, sur un mur, un écriteau qui porte ces simples mots : « La commune de Mittlach est redevenue française le 26 avril 1915. » Tout auprès, ma photographie avec un flot tricolore. La population, d’ailleurs peu nombreuse, m’accueille avec une curiosité sympathique, mais elle est beaucoup plus réservée que celle de la basse vallée de la Thur. Elle se demande, sans doute, si les faits ne démentiront pas demain l’écriteau d’aujourd’hui.

Nous déjeunons, le général de Pouydraguin et nous, au poste de commandement du lieutenant-colonel Boussat, qui commande le groupe de chas-