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braves ! » Gagné moi-même par cette émotion, je me promets de signaler, à nouveau, au général Joffre les défauts de méthode dont se plaignent tant de combattants.

Je quitte le Valtin avec le général Pouydraguin, commandant de la 47e division, qui me donne des renseignements confirmatifs. Je sais bien que le 3 août, Joffre vient d’envoyer aux officiers de liaison du quartier général des instructions pour qu’ils se rendent un compte plus exact des nécessités de la guerre et poussent toujours leurs inspections jusqu’aux lignes avancées. Mais le contact paraît encore insuffisant entre le G. Q. G. et le front.

Par la jolie vallée de la Moselotte, nous descendons jusqu’à Cornincourt, pour remonter aussitôt au col de Bramont, merveilleusement décoré de sapins et d’herbages. Les Vosges franchies, nous voici en Alsace et, par une belle route en lacets, nous suivons la haute vallée de la Thur, jusqu’au petit village de Krüt. Là, nous nous arrêtons, pour entrer dans quelques cantonnements. Des soldats se précipitent vers nous, et aussi des enfants, garçons et fillettes, qui nous offrent des fleurs. Mais Loti, qui n’est jamais venu en Alsace ni même dans les Vosges, s’étonne d’entendre ces jeunes écoliers parler un dialecte germanique. Ils savent, en effet, beaucoup moins le français que les élèves du bas de la vallée.

A Krüt, nous quittons nos automobiles fermées pour en prendre de plus légères, découvertes, et monter plus aisément les pentes du Griebkopf. Par une route nouvelle, que viennent d’ouvrir les officiers du génie militaire et qui grimpe lestement au milieu des sapins et des hêtres, nous poussons